La campagne Obama 2012: Rockn’Techno!

Le magazine The Atlantic nous présente un article palpitant sur l’arrière-scène technologique de la campagne d’Obama (merci Vallier Lapierre pour le signalement). Le pari était audacieux: développer l’architecture logicielle permettant de réunir et de présenter en temps réel toutes les informations sur leurs partisans, électeurs, donateurs et bénévoles. Jusque là, les partis se contentaient de faire des ponts entre
les outils logiciels développés par des tiers et leurs outils internes et on pouvait obtenir des rapports à des intervalles réguliers qu’il fallait ensuite triturer et analyser pour en tirer les conclusions utiles.

Le projet intitulé Narwhal est né de l’incapacité des fournisseurs externes de livrer une solution assez robuste pour une campagne électorale. On y a réuni les meilleurs geeks et ingénieurs informatiques, organisateurs politiques et spécialistes du marketing interactif. Et au jour J, alors que le système des Républicains appelé Orca (l’orque est un prédateur du narval) s’écroulait, celui des Démocrates développé sur l’architecture de cloud computing d’Amazon était un franc succès sur toute la ligne.

Or le plus impressionnant, c’est que le projet a été développé avec la méthodologie agile. Et à la première livraison du tableau de bord, les organisateurs du parti ont failli tous les virer, car si le système était bien conçu, simple et robuste, l’interface était pourrie et les non initiés ne pouvaient pas s’imaginer un produit fini. Et c’est vers la fin que le miracle a eu lieu.

L’article décrit très bien la tension quasiment insoutenable qu’il y avait parfois entre les développeurs et les gestionnaires. Chapeau aux gestionnaires du Parti démocrate qui ont eu le courage de faire confiance jusqu’à la fin.

Le magazine Ars Technica permet d’approfondir le sujet en présentant tant le point de vue des Démocrates que celui des Républicains. D’autres y vont d’une critique impitoyable du projet Orca.

Le rapport Gagné: de l’aide pour quoi faire?

Carl-Frédéric De Celles évoque le rapport Gagné dans son billet sur l’Alliance numérique. Le rapport est dévastateur pour le programme des crédits multimédia et les « cités du multimédia » et lance quelques bonnes idées.

Les programmes n’ont pas créé d’emplois:

« On doit constater que depuis 2000, il n’y a globalement pas eu de création
d’emplois dans l’industrie des services des technologies de l’information. »

On a financé des déplacements d’emplois à l’intérieur du Québec :

« Pour le groupe de travail, les déplacements d’emplois constituent manifestement
un dérapage par rapport aux objectifs visés. On a en fait assisté dans certains cas
à une véritable délocalisation à l’intérieur du territoire québécois, ce qui, bien
entendu, n’était pas du tout le but recherché. »

Favoriser la création d’activités à forte valeur ajoutée;

Ici, on indique que l’aide doit bénéficier aux activités innovantes, soit « des activités soutenues dans le secteur des technologies de l’information correspondent au développement et à la fourniture de produits et services liés aux affaires électroniques, tels que
— les services-conseils reliés au développement de système,
— la mise à niveau de l’architecture technologique,
— la conception et le développement de solutions de commerce électronique. »

Intéressant, mais cette définition semble faire double-emploi avec les crédits R&D. Et surtout, l’innovation dans le Web n’est plus limitée aux technologies, mais à leurs usages. À suivre…

Alors voilà que le budget confirme l’octroi de crédits de 30% pour tous les employés d’entreprises qui oeuvrent dans les portails, moteurs de recherhce, sites web transactionnels. La définition est si vaste qu’elle couvre à peu près tout ce qui bouge en technologie au Québec. Vous pensez vraiment que l’industrie québécoise des TI a besoin d’aide?

Notre industrie s’abreuve de manière indécente aux mamelles de l’État…

Le Web permet l’échange, mais les partis ne l’ont pas encore compris…

Plus que deux semaines avant le jour du scrutin et on peut d’ores et déjà tirer une conclusion: les partis n’ont pas encore intégré l’outil du Web. Car il y a deux mondes entre imaginer une stratégie Web et la réaliser. Je suis bien placé pour le savoir…

La technologie impose un rythme d’enfer aux partis politiques. Avec les PDA les délarations d’un chef se retrouvent instantanément sur les Blackberry des adversaires qui lancent alors une réponse instantanée et qui permettent aux médias de jouer la déclaration fracassante doublée d’une réponse assassine. Et l’électeur, déçu, se plaint, à juste titre, qu’on ne discute pas des enjeux dans la campagne…

Pourtant, le web aurait permis de déjouer cette dynamique électorale tordue: les blogues, les espaces de discussion, les abonnements par courriel pourraient permettre ce genre d’échanges, de débats. Mais pour y parvenir, il faut sortir de la dynamique de l’affrontement et permettre aux doutes de s’exprimer, aux convictions de se construire et aux échanges de se produire. Or aucun parti n’y est parvenu, car tous ont décidé de reproduire sur le Web les mêmes vieilles recettes appliquées aux médias: la diffusion d’un seul et même message uniformisé, aplani et unidirectionnel pour tous.

Cette fin de semaine, je faisais du porte-à-porte dans la circonscription de Gouin, où Françoise David a de véritables chances de se faire élire. Et j’ai croisé des vraies personnes, qui s’interrogent, qui doutent, qui hésitent et qui acceptaient le dialogue. Et cet échange était basé sur peu de choses: l’écoute et la confiance. Et j’ai adoré.